Philosophie zoologique – Lamarck

Tout ce qui est dit là sur Lamarck est faux.

nous dit Bertrand Louart en commentaire du billet « Faisons sa fête à Darwin« .

Voyons ce qui est dit sur Lamarck et si c’est faux 🙂

  • […]la biologie (baptisée par Lamarck)[…]

    Le terme biologie est bel et bien un néologisme (pour l’époque) forgé par Lamarck.

  • L’ami Lamarck avait décrit son transformisme, l’évolution des espèces, tranquillement, suivant un schéma qui supportait l’Auteur de toutes choses et une téléonomie considérant comme héréditaires les caractères acquis.

    Pour la transmission des caractères acquis, les mots de Lamarck :

    […]je pus saisir le fil qui lie entr’elles les causes nombreuses des phénomènes que nous offre l’organisation animale dans ses développemens et sa diversité ; et bientôt j’aperçus l’importance de ce moyen de la nature, qui consiste à conserver dans les nouveaux individus reproduits, tout ce que les suites de la vie et des circonstances influentes avoient fait acquérir dans l’organisation de ceux qui leur ont transmis l’existence. [Philosophie Zoologique, J.B.P.A. Lamarck, Avertissement, xvi]

    Pour l’Auteur de toutes choses et la téléologie, les mots de Lamarck :

    Or, n’ayant pas fait attention que les individus d’une espèce doivent se perpétuer sans varier, tant que les circonstances qui influent sur leur manière d’être ne varient pas essentiellement, et les préventions existantes s’accordant avec ces régénérations successives d’individus semblables, on a supposé que chaque espèce étoit invariable et aussi ancienne que la nature, et qu’elle avoit eu sa création particulière de la par de l’Auteur suprême de tout ce qui existe.

    Sans doute, rien n’existe que par la volonté du sublime Auteur de toutes choses. Mais pouvons-nous lui assigner des règles dans l’exécution de sa volonté, et fixer le mode qu’il a suivi à cet égard ? Sa puissance infinie n’a-t-elle pu créer un ordre de choses qui donnât successivement l’existence à tout ce que nous voyons, comme à tout ce qui existe et que nous ne connoissons pas ?

    Assurément; quelle qu’ait été sa volonté, l’immensité de sa puissance est toujours la même; et de quelque manière que ce soit exécutée cette volonté suprême, rien n’en peut diminuer la grandeur.

    [Philosophie Zoologique, J.B.P.A. Lamarck, Chapitre III, De l’Espèce parmi les Corps Vivants, et de l’idée que nous devons attacher à ce mot]

    Voilà ce qui est dit sur Lamarck. Je vous laisse décider si c’est faux ou pas et dans quelle mesure il faut prendre au sérieux les commentaires de Bertrand Louart.

    1. #1 par all le février 14, 2009 - 4:59

      * « ce moyen de la nature » = qu’il se garde de définir et qu’il ne peut décrire.

      A cette époque la sélection naturelle n’est pas théorisée.
      L’hérédité fut découverte par Haeckel, puis Wisemann posa le principe de la non-transmission des caractères acquis. La science donna raison plus tard à Darwin et Wisemann, ce n’est pas pour autant qu’il faut oublier les précurseurs.

      * Chapitre VI (des générations directes et spontanées) deuxième volume il parle encore du Sublime Auteur puis écrit : « Ainsi, l’organisation et la vie ne sont que des phénomènes naturels, et leur destruction dans l’individu qui les possède n’est encore qu’un phénomène naturel, suite nécessaire de l’existence des premiers. »
      La différence est claire entre le naturel (et son étude) et le divin. Il règle définitivement son compte au fixisme et à la création divine sans que cela fasse scandale – il est le premier à avoir apparenté l’homme avec le singe ; il est vrai que la religion catholique, avec le Nouveau Testament, s’était détachée depuis bien longtemps de l’ancien testament. A la différence des protestants anglo-saxons qui se vautrent encore dans la Bible et prennent la genèse à la virgule près.

      L’histoire avec B. Louart je n’ai pas suivi depuis le début, et dommage car j’aime bien les polémiques

    2. #2 par Aredius44 le février 14, 2009 - 5:25

      Continuez…je révise le cours que nous a fait Stéphane Tirard au Centre François Viète !
      Et c’est quand même plus beau tout ça qu’une histoire de côtelette.

    3. #3 par Oldcola le février 14, 2009 - 5:31

      Salut all,
      Je n’oublie pas les précurseurs, seulement ce n’est pas la peine de les ramener sur le tapis à chaque fois que l’on parle d’autre chose.

      Je crois que c’est avec toi que j’ai eu l’occasion de discuter de la transmission des caractères à la descendance [périphrase pour hérédité] qui était dans l’air depuis Aristote déjà. [vérification faite oui, chez Dr Goulu]

      Lamarck ne règle pas son compte à la création divine ! Il propose une création suivant une autre manière que celle que l’on acceptait suivant le mythe de la Genèse. Je pense que c’est ce qui fait son succès auprès des soft/néo-créationistes façon Jean Staune qui se retranchent derrière le principe anthropique fort.

      La doctrine créationniste est très catholique [le terme même est le produit de théologiens catholique je pense], et BXVI déplore les dommages occasionnés par son délaissement. Même les plus darwinistes des soft-creationists, comme Ken Miller, font référence à l’Intelligent Designer, le Grand Horloger, l’Auteur, etc.

      Il ne faut pas oublier que si les théologiens plus ou moins libéraux (et les croyants de même), qui sont à la mode, n’ont rien de commun avec les YEC au sujet de la lecture littérale des Ecritures, ils partagent la même croyance à la Création par Dieu et au dessein (telos, τέλος) divin.

      Henri,
      j’ai une soudaine envie de côtelettes d’agneau au thym ! Devrais arranger ceci pour ma Valentine 🙂

    4. #4 par Tranbert le février 14, 2009 - 7:06

      Qui a dit :

      « Nous devons nous rappeler surtout que des modifications acquises, qui ont continuellement rendu des services dans le passé, ont dû probablement se fixer et devenir héréditaires. »

      Réponse : Darwin, La descendance de l’homme et la sélection sexuelle, 1871 ; éd. Reinwald, 1891, p. 62.

      Lamarck admet la transmission des caractères acquis, sans proposer une théorie de l’hérédité – puisque la notion moderne d’hérédité n’existe pas à son époque.

      Darwin proposera une théorie de la transmission des caractères acquis en 1868 dans « Les variations des animaux et des plantes sous l’effet de la domestication », le problème de l’hérédité commençant à se poser en son temps.

      Et vlan !

    5. #5 par Oldcola le février 14, 2009 - 8:08

      C’est vrai que Charlie n’a pas dit que des bonnes choses. C’est pourquoi dans Faisons sa fête à Darwin on se concentre sur une bonne idée. Il aurait dû lire Gregor, il nous aurait vraiment fait gagné du temps.

      La question de la transmission des caractères acquis se pose encore aujourd’hui. La piste la plus sérieuse reste encore celle de la transmission de mutations somatiques vers la lignée germinale, mais rien n’indique, dans les travaux publiés que j’ai eu l’occasion de lire, que ce transfert soit distinct des autres mutations, aussi aléatoire. Peut-être que Bertrand, ou un autre lecteur, pourrait proposer une référence pertinente (publications scientifiques exclusivement SVP) que je devrais lire ?

      Bertrand, le verlan, le changement d’adresse e-mail et la puérilité ne changent absolument pas la façon dont tes commentaires sont/seront traités.

    6. #6 par all le février 14, 2009 - 8:31

      Je n’oublie pas les précurseurs, seulement ce n’est pas la peine de les ramener sur le tapis à chaque fois que l’on parle d’autre chose

      C’est quand même pas moi qui ai ouvert la discussion avec deux citations de LAMARCK et deux interprétations. De quoi parle-t-on ici ?

      Le plus drôle en ce moment est que ce sont les scientifiques matérialistes qui mettent toujours en avant la religion, alors que les croyants se taisent sur le sujet (sauf les créationnistes qui ont de grosses gueules). Le vide spirituel ça doit créer un manque, une souffrance que n’éteindra pas l’ingestion de côtelettes d’agneaux.

    7. #7 par Oldcola le février 14, 2009 - 9:03

      De quoi parle-t-on ici ?

      Excuses, je pensais que le titre du billet faisait apparaître clairement qu’il s’agissait de Lamarck et de son livre Philosophie zoologique.
      De même, le contenu du billet concerne le commentaire de Bertrand, qui dit

      Tout ce qui est dit là sur Lamarck est faux.

      Les citations viennent à l’appui de ce que nous avons publié.

      Je ne sais pas si cette explication de texte rend les choses plus claires que le billet lui-même.

      Au sujet du dernier paragraphe de ton commentaire.

      Je m’en branlais complètement des religieux et croyants depuis mon adolescence, jusqu’à 2005. Me rendre compte des efforts des lobby religieux pour garder un peu de respectabilité en s’accolant à la science, avec comme exemple local Jean Staune, m’a foutu (presque) en rogne.

      Jamais, et c’est vrai encore aujourd’hui, les structures religieuses n’ont cessé de chercher la respectabilité nécessaire pour imposer leurs points de vue en politique. Dernier exemple (de ceux que je suis) en date, BXVI qui appelle les hommes politiques catholiques à imposer les enseignements de l’église. C’est ça se taire ? Non, se taire serait d’arrêter de se servir des médias pour parler et se concentrer à diffuser le message religieux au sein des églises. BXVI a une aussi grand gueule que n’importe quel autre créationniste.

    8. #8 par Tom Roud le février 15, 2009 - 4:17

      Sur l’hérédité des caractères acquis, l’exemple favori de all est l’épigénèse. Par exemple Novick et Wiener, PNAS, 1953 (pas le temps de vérifier, mais c’est celui-là je crois : http://www.pnas.org/content/43/7/553.full.pdf+html?ck=nck) – il y a une chercheuse française qui s’appelle Janine Guespin qui a écrit pas mal de choses là-dessus. Bien sûr, cela ne semble pas être le truc majeur dans l’évolution, mais on ne peut pas dire que ça n’existe pas.

      C’est amusant cette façon de dire que Darwin a dit de « mauvaises choses ». Je ne sais jamais si tu dis ça dans le sens « dire des choses idiotes » (i.e. stupide) ou au sens « proposer quelque chose » qui s’avère au final faux. Spéculer n’est pas une mauvaise chose en soi, ça nourrit la réflexion et donne au moins des modèles alternatifs entre lesquels discriminer. Les erreurs des grands scientifiques sont en général de grandes erreurs qui font aussi avancer la science (voir en physique par exemple la constante cosmologique d’Einstein ou le paradoxe EPR).

    9. #9 par Tom Roud le février 15, 2009 - 4:20

      PS : c’est quoi ce bonhomme immonde à côté de mon nom dans le billet ???

    10. #10 par Oldcola le février 15, 2009 - 11:56

      Le bonhomme immonde est une façon de pousser les gens à avoir des icônes visibles à travers les divers blogs WordPress. Je vois que tu as trouvé la réponse 😉

      Tu as dû te rendre compte que je ne tiens rien pour sacré et personne pour tout juste. C’est mon plus précieux a posteriori. Il n’y a aucune raison d’exempter mes amis ou les grands scientifiques, ou ceux que je considère être les deux, de cette façon de voir.
      Pour Darwin les deux, stupide et faux, s’appliquent. Ca serait étonnant que durant une vie on réussisse de ne pas dire des conneries.

      Emettre des hypothèses est la base du travail des scientifiques, essayer de les invalider le deuxième pas. Rien de nouveau là.
      Là où ça devient agaçant, très agaçant, et risible, c’est quand les hypothèses émises sont triées sur des bases idéologiques avant mise en test.
      Mes deux favoris à « scruter autant que possible » sont les néo-lamarckiens et les néo-platoniciens; deux approches qui autant que je peux le voir se consacrent à la défense d’une téléologie créationniste (créationniste au sens du dictionnaire), nourrie par la propension à la superstition.

      La discussion sur Lamarck et Darwin et l’hérédité apparente de certains caractères phénotypiques est en train de nourrir un vieux projet, de ceux qui sédimentent avec le carnet où ils sont notés. Je l’ai ressorti ce matin et peut-être il y aurait quelque chose à faire avec 😉

    1. ENZYME INDUCTION AS AN ALL-OR-NONE PHENOMENON « Coffee and Sci(ence)

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